THE I.C.E. ST-MORITZ 2025
Élégance on the rocks
Imaginez plus de cinquante automobiles parmi les plus précieuses au monde, totalisant une valeur de plusieurs centaines de millions de francs, paradant sur un lac gelé. Des merveilles mécaniques et leurs conducteurs un peu fous, défiant les lois de la physique – et parfois du bon sens – à quelques centimètres seulement d'une eau glaciale. Bienvenue à The I.C.E. St-Moritz, le concours d'élégance le plus décalé, probablement un peu risqué et sans doute le plus photogénique de la planète.
Norman Foster et Marc Newson
L'édition 2025 de The I.C.E St-Moritz, qui s’est tenue les 21 et 22 février derniers dans la station suisse, a marqué un retour en force de cet évènement après les péripéties de l'an dernier lorsqu’une invraisemblable tempête de neige avait contraint les organisateurs à relocaliser le concours dans... un parking souterrain. Cette année, les dieux de la météo alpestre étaient de la partie. Sous un soleil resplendissant et avec des températures négatives idéales, la glace du lac – épaisse de 40 centimètres, rassurez-vous, hypochondriaques de la banquise – a accueilli plus de 20’000 spectateurs, un record.
Organisé depuis 2019 seulement, et malgré la pandémie et les aléas de la météo, The I.C.E. s’impose comme un rendez-vous incontournable du calendrier automobile mondial. Les grandes marques ne s’y sont pas trompées, à commencer par l’horloger Richard Mille, sponsor principal de l’évènement. Toute une floppée de constructeurs automobiles… et de bateaux – Riva figurant également au tableau des sponsors – se sont joints à la fête, certains réquisitionnant même des bâtiments emblématiques de la région, comme Ferrari l’hôtel Kulm ou Koenigsegg le Suvretta. Maserati, partenaire historique de l’évènement, Ruf, Pagani, Lamborghini et même Rimac ont également accueilli leurs clients pour le week-end.
Le spectacle est permanent, tant dans le village que sur le lac : promeneurs aux looks excentriques étudiés et supercars à tous les coins de rue ravissent les carspotters. Une fois sur le lac gelé, on change encore de braquet : les serveurs, habillés en queue de pie et patins aux pieds, virevoltent entre les tables. Et finalement, les 52 automobiles participantes. Chapeau bas aux propriétaires de ces voitures d’exception qui risquent leurs fortunes sur roues en les présentant sur la glace.
... en six éditions seulement, The I.C.E. St-Moritz s'est imposé comme une anomalie réjouissante dans le paysage feutré des concours d'élégance...
Parmi ceux-ci, le collectionneur Egon Zweimüller est venu présenter sa fameuse McLaren M1A de 1965 conduite par Elvis Presley dans le film « Spinout », pendant que la Lamborghini Countach Safety Car originale du Grand Prix de Monaco 1982 déchaînait la foule. Malgré leur garde au sol quasi inexistante, ce fut un vrai régal pour les yeux et les oreilles de voir ces voitures de course s’élancer sur la piste glacée et enneigée (en réalité l’anneau des courses hippiques se tenant les week-ends précédents), avec au volant des pilotes du calibre de Tom « Le Mans » Kristensen, qui a conduit le prototype Audi Quattro Groupe S tout droit sorti du musée de la firme aux anneaux, ou l’inusable Arturo Merzario – son légendaire Stetson vissé sur le crâne – au volant d’une Abarth 2000 Sport Spider vêtue de curieuses chaussettes rouges. Horacio Pagani, pourtant père des hypercars éponymes, a remporté la catégorie Icon on Wheels non pas grâce à une automobile portant son nom mais sa splendide Ferrari 275 GTB/4, première du genre à sortir des ateliers de Maranello.
Le prix "Spirit of St. Moritz", conçu par l'artiste Rolf Sachs (le fils de feu le mythique playboy et mari de Brigitte Bardot, Gunther Sachs) a été attribué à une Ferrari 250 GT SWB "SEFAC" parée d'un porte-ski et d'une luge, accessoires incongrus mais finalement seyants sur un bolide italien des sixties. Quant au public, il a plébiscité la Lamborghini Miura SV comme "Hero Below Zero", titre qui sonne comme une chanson de hard metal scandinave.
L'architecte star Norman Foster avait imaginé pour l'occasion un trophée "Best in Show" aussi élégant qu'épuré – on n'en attendait pas moins de l’anobli britannique. Et c'est un autre créateur de génie, l'australien Marc Newson, qui l'a soulevé grâce à sa sublime Bugatti Type 59 de 1934. La rencontre de ces deux monuments du design contemporain sur la scène de remise des prix constituait à elle seule un événement dans l’événement. Marc Newson, dont les créations ornent les plus grands musées du monde, n'est pas un collectionneur dilettante.
Sa Bugatti bleu pâle, l'une des cinq Type 59 existantes, est considérée comme le chant du cygne des efforts d'Ettore Bugatti dans le domaine du sport automobile. Une pièce d'histoire roulante qu’il n'a pas hésité à lancer sur le circuit, prouvant que certaines œuvres d'art méritent d'être admirées en mouvement.
Le microcosme automobile n'était pas le seul à avoir fait le déplacement. L'acteur Jason Momoa, plus connu sous les traits d'Aquaman (un comble sur un lac gelé), s'est offert quelques dérapages contrôlés au volant d'une Bentley de la grande époque.
Richard Mille à The I.C.E St-Moritz
Mondialement reconnue pour ses garde-temps disruptifs, la marque Richard Mille est revenue dans les Grisons en tant que sponsor principal de The I.C.E. pour la troisième année consécutive.
Tilly Harrison, DG de Richard Mille Middle East et Turquie, a d’ailleurs remis le prix Best in Show au designer australien Marc Newson en déclarant : « Le trophée, conçu par Lord Norman Foster exclusivement pour The I.C.E. St Moritz Richard Mille, n'aurait pas pu être attribué de manière plus appropriée à Marc Newson et à sa Bugatti 59, une icône de la course automobile célèbre pour son design visionnaire, son innovation et son savoir-faire exceptionnel - des qualités qui correspondent parfaitement aux valeurs de Richard Mille. »
La marque horlogère était d’ailleurs largement représentée à St-Moritz, où l’on a pu croiser Sébastien Ogier, huit fois Champion du monde des rallyes, en compagnie de Tim Malachard, le CMO de Richard Mille. Celui-ci portait d’ailleurs au poignet la dernière-née de la marque, la RM 16-02 Automatique Extraplate. Disponible en deux versions (titane ou terracotta), elle renferme des sophistications techniques notables, dont son calibre CRMA9, le quinzième et dernier né des calibres maison, dont le travail de squelettisation est remarquable.
Deux premières pour Maserati à The I.C.E St-Moritz
Comptant parmi les premiers soutiens du concours d’élégance grison, Maserati n’est pas arrivée les mains vides en Engadine. Elle y lançait deux modèles en avant-première mondiale exclusive.
La marque au trident a présenté la GranCabrio dans une nouvelle version de 490 ch équipée du moteur V6 Nettuno doté de deux turbos et qui transmet sa puissance aux quatre roues, permettant à la voiture d'atteindre les 0 à 100 km/h en 4 secondes. Cette motorisation vient compléter la gamme GranCabrio, en plus des déclinaisons Trofeo de 550 ch et Folgore 100 % électrique.
Afin d’illustrer les possibilités de personnalisation du programme Maserati Fuoriserie, un modèle unique évoquant les conditions glacées de l’évènement a été présenté. Ce GranCabrio Trofeo One of One The I.C.E. se couvre d’une couleur de carrosserie spécifique bleutée Ice Liquid, assortie à des jantes et des badges blancs Gloss White, ainsi qu’à magnifique intérieur en cuir couleur glace.
Au centre du lounge Maserati construit à même la glace du lac trônait la nouvelle Maserati GT2 Stradale, tandis que du côté des voitures anciennes de la marque, une Maserati 250 F (1954) et une Maserati 200 SI de 1957 ont participé au Concours International d'Elégance.
En six éditions seulement, The I.C.E. St-Moritz s'est imposé comme une anomalie réjouissante dans le paysage feutré des concours d'élégance. Là où Pebble Beach, Villa d'Este ou Hampton Court misent sur une certaine solennité, l'événement suisse cultive un esprit décalé où la passion automobile se mêle à une forme de douce folie. Une folie très bien organisée grâce à Marco Makaus, Ronnie Kessel et leur remarquable équipe. Vu l’extraordinaire succès de cette année, à quoi donc faudra-t-il s’attendre pour 2026 ?
Le Palmarès
Barchettas on the Lake : Ferrari 500 TRC Scaglietti, 1957
Open Wheels : Bugatti Type 59, 1934
Concept Cars & One-Offs : Alfa Romeo 6C 1750 GS Aprile, 1931
Icons on Wheels : Ferrari 275 GTB/4, 1966
Racing Legends : Porsche 908/03, 1971
Spirit of St-Moritz : Ferrari 250 GT SWB « SEFAC », 1961
Hero Below Zero : Lamborghini Miura SV,1972
Best in Show : Bugatti Type 59, 1934
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